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AU CAMEROUN, LA LIBERTÉ DE LA PRESSE ENCORE ATTAQUÉE

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Pour avoir mené une enquête sur les trafics des organes humains et les agressions dans la région de l’Adamaoua, Bertrand Ayissi, journaliste à L’œil du Sahel, a été convoqué par le gouverneur, puis détenu toute la journée du 12 septembre 2023 à la compagnie de gendarmerie de N’Gaoundéré.

 

Par Njiki Fandono

Dans son édition du vendredi 18 août 2023, le journal l’œil du Sahel, Tri-hebdomadaire régional d’informations du Nord-Cameroun s’intéresse à la région de l’Adamaoua et titre en sa grande Une : «le règne des agressions et trafics d’organes humains». Bertrand Ayissi, journaliste et chef d’agence de l’œil du Sahel dans la région, étaye son enquête avec des témoignages glaçants qui plongent les lecteurs au cœur d’un phénomène notoire, dangereux et redouté par la population. Depuis 2019, «le trafic d’organes et ossements a révélé ses tentacules dans la région et ne fait qu’empirer», indique le journal. Au plan sécuritaire, révèle l’enquête, ce n’est pas la grande quiétude dans la région. «L’insécurité est exagérée, on agresse trop ici à Meiganga», témoigne Albert Bello, conducteur de moto. A 26 ans, ce père de famille dont le front fissuré présente encore des points de suture clinique, a raconté dans l’édition en question, les circonstances de son agression survenue le samedi 4 août 2023.

Menaces et intimidations

Après la publication de cette enquête dont les faits relevés auraient dû retenir l’attention des pouvoirs publics afin d’assurer une meilleure sécurité aux populations, Bertrand Ayissi se voit plutôt servir une convocation administrative par Kildadi Taguieke Boukar, pour «affaire le concernant». Sans aucun droit de réponse préalable comme le stipule la loi du 19 décembre 1990, le journaliste doit se rendre dans les services du gouverneur de l’Adamaoua le 12 septembre 2023 à «10heures pour affaire le concernant». Le professionnel de la plume s’exécute. Il sera conduit à la compagnie de gendarmerie de N’Gaoundéré, auditionné pour «propagation de fausses nouvelles», détenu et libéré vers 17h24 min. Terrifié et stupéfait par la tournure des événements, Bertrand Ayissi a préféré garder le silence lors son audition dit-il, mais les menaces et intimidations prononcées par le gouverneur sont gravées dans sa mémoire.

«On vous a monté en 2018 pour dire qu’il y a des enlèvements. Vous croyiez me faire tomber. Mais ça fait 8 ans que je suis là, en poste. Ça ne vous dit rien ? Trouvez-vous normal de dire que l’Adamaoua est sous le règne des ossements humains et des agressions ? Si vous n’avez rien à faire, vous n’allez pas troubler l’ordre public dans la région, avec vos déclarations mensongères. Si vous êtes des journaleux ou des journalistes à gage, et que vous cherchez quoi faire, ce n’est pas dans ma région que vous allez continuer à troubler l’ordre», peste l’autorité administrative. De quoi mettre vent debout le Syndicat national des journalistes du Cameroun (Snjc) qui dénonce une énième atteinte à la liberté de la presse au Cameroun ; alors que les journalistes n’ont pas encore fini de pleureur Samuel Wazizi, Anye Ndeh ; sans oublier l’assassinat effroyable en début d’année de Martinez Zogo.

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